« Comme autrefois dans le ventre de notre mère le liquide amniotique où nous voguions, cet espace qui nous entoure est l’espace nourricier. L’essentiel est ENTRE. L’essentiel est dans le mouvement de navette entre les bords, entre les rives, de l’instant de la naissance à l’instant de la mort, de ma bouche à votre oreille, de votre coeur au mien, de l’aube au crépuscule. L’allée et venue entre l’homme et la femme, l’espérance et la désespérance, le monde visible et le monde invisible, le temps horizontal et l’éternité. L’essentiel respire ENTRE.
L’essentiel n’est pas dans un lieu situé dans un âge d’or qu’il s’agirait de retrouver. Il n’est de fidélité au passé que dans l’avenir, que dans cet élan vers l’avant ! Dès que l’on s’arrête dans un lieu, c’est déjà un casus belli qui s’annonce : il va falloir le préserver, le défendre. Ainsi, le tombeau du Christ : des générations entières ont cru qu’Il était là, dans ce tombeau, et qu’il fallait le défendre ! Or le tombeau du Christ n’est nulle part ailleurs que dans nos coeurs de pierre.
L’essentiel n’est pas là où notre raison, notre intellect le cherchent (bien qu’il puisse y être aussi, comme partout ailleurs). Il n’est pas dans les lieux où on l’annonce avec solennité (bien qu’il puisse y être aussi, comme partout ailleurs). Il n’est pas à la place où on l’a rencontré la dernière fois et où l’on retourne le coeur battant (bien qu’il puisse y être aussi, comme partout ailleurs).
Si l’essentiel te semble parfois n’être nulle part, c’est en fait qu’il peut être partout à tout instant.
« Quand tu fends du bois, je suis là. Quand tu soulèves une pierre, je suis sous la pierre. Ne me cherche pas ailleurs que partout. » dit l’Evangile de saint Thomas.
Si l’essentiel est partout, il ne manque plus que nos yeux pour le voir…Ouvrir les yeux, sortir de l’anesthésie féroce de nos coeurs ! Nous laisser attendrir, toucher par la gratitude d’être vivants ! Non pas des voyeurs, des (télé)spectateurs consentants de la destruction du monde, mais des témoins de la merveille du monde crée ! »
Christiane Singer
(N’oublie pas les chevaux écumants du passé)